" Je me sens nouveau-né à chaque instant dans la sereine nouveauté du monde " Fernando Pessoa
Bonjours à tous & toutes
2019 est entrée dans nos vies...
Et nous sommes déjà sur le rythme de la course pour gagner le lapin d’Alice. Mais, il y a de l’espoir, j’ai reçu deux lettres par la poste de deux amis.
J’ai aussi reçu quelques mails en couleurs et images, comme cette lettre que je vous adresse à chacun de vous :
« Raymond Isabel Jérôme Nicolas Maria François Anne Sabine Emmanuelle Paloma Maryse Luz Louison…
1600 noms ! 1600 corps ! 1600 cœurs ! »
Cette lettre est pour vous, elle n’est pas efficace comme une publicité mais elle ne cherche pas à l’être.
C’est une lettre des vœux, à la couleur du chiffre 201 NEUF
J’ai pris du temps à l’écrire, à la penser, à vous imaginer en train de la lire. Laissez-moi, l’espace pour arriver jusqu’au bout du souffle qui m’habite dans cet instant même.
Dans ce mois de janvier !
Je reviens sur ces lettres trouvées dans ma boîte aux lettres, parce qu’elles me font réfléchir au sens de la vie... Elles me disent :
Nous sommes la preuve d’une humanité qui cherche à communiquer !
Une humanité qui cherche son langage, sa nouvelle boîte à lettres, cette humanité qui fait preuve d’un peu de douceur. Et cette douceur, contenue dans mes deux lettres (ceux qui l’ont écrit se reconnaîtront) arrache mon corps à cette accélération du quotidien dans laquelle par moment je me sens emportée.
Comme un pantin aux fils invisibles, condamnée et commandée par un autre pantin qui dicte mes pas et même mon ombre !
Suis-je seule ou sommes-nous des milliers ?
Des patins aux chaussures très Nike ?
A la dérive, nous sentons nos jours couler ! Et nous couler avec ?
Vous me direz :
« Mais si c’est ça ta lettre, nous on n’en veut pas !
Fais nous rire ! Surprends nous ! Change de registre ! »
Je persiste !
Le pantin que je suis, se réveille de temps en temps !
Par exemple, quand mon voisin vient frapper à la porte sans rendez-vous programmé en avance, quand dans le détour d’une rue je croise un regard qui croise mon regard et tout s’arrête. Ou bien quand je sens la vie palpiter de tout son plein à la porte du cimetière. Et oui, étrange, mais vraie !
La vie n’est jamais loin de la mort !
J’aime me promener dans les cimetières. J’ai la chance d’habiter juste à côté du plus beau de Brest, j’y vais souvent, surtout le matin tôt.
J’aime aller parler avec mes morts même s’ils ne sont pas là.
Une matinée d’automne, j’ai croisé un vieil homme devant la porte du cimetière, il portait un bouquet de fleurs :
Moi : "Bonjour monsieur, il est beau votre bouquet !"
Lui : "Elle m’a laissé un jardin plein de fleurs !"
Toute sa vie, leur vie, était dite dans cette phrase.
Et au moment de cette rencontre, grâce à lui…
Je suis devenue Moi pour quitter ma place de pantin !
Tout au long de la journée je sentais ces fleurs en moi.
Et j’étais habitée par ces mots :
« « Elle m’a laissé un jardin plein des fleurs » »
Je vous raconte ce petit moment de rien du tout, parce qu’il est pour moi révélateur de ce qu’il me semble manquer dans ce monde d’agitation et de fils invisibles : L’amour et son expression.
Mais au delà de cette grande tâche, des gestes infimes qui nous redonnent le goût de l’essentiel :
Un peu plus d’yeux qui se regardent, un peu plus de fleurs pour embellir nos jardins intimes, un peu plus de gratitude pour cette planète terre qui nous supporte et qui nous porte, un peu plus de temps pour changer notre monde !
La révolution ou l’amour ?
Et pourquoi pas les deux !
Je dirais même les trois : La Révolution L’Amour et Le Jardinage !
Je partage avec vous cette évidence qui est la mienne, cette manière qui est la mienne de regarder le monde et de le rêver. De tenter de l’inventer !
Réinventer la Révolution, l’Amour et le Jardinage !
Comment faire ?
Je cherche.
Mais, disons que j’ai l’impression que quand je trouve un début de réponse, c’est surtout quand je me laisse surprendre par la vie !
Quand je prends le temps !
Le temps pour rien, le temps pas productif, le temps sans obligation, le temps pour regarder le monde, vagabonder et laisser venir :
Se laisser surprendre par la vie !
Elle est partout… même devant la porte du cimetière !
OUVRIR LES YEUX LEVER LA TÊTE SORTIR DU BROUILLARD !
Regarder le mouvement d’une feuille qui chute vers le sol !
Ouvrir les yeux ?
Ta naïveté te tuera un jour !
Tu ne vois pas la course du monde ? On n’a pas le temps de regarder le mouvement d’une feuille qui chute vers le sol !
Elle va me dire quoi, ta feuille ?
« JE DANSEeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeee ! »
La tête dans le portable, les jambes dans le vélo du gymnase, le nez dans les mails, les pieds dans la boue, les mains sur le chariot, les oreilles sous le casque, la bouche dans le surimi... la langue sans mots, le corps sans corps.
Pourtant quand je prends le temps de regarder la feuille, je danse moi aussi !
Ou quand je prends le temps de parler avec mon voisin Pierre, le monsieur qui connaît le bruit de la terre (c’est lui qui fait le trou pour les morts) :
JE DANSE AUSSI !
JE DANSE À L’INTÉRIEUR ET ÇA ME DONNE DE LA JOIE !
C’est aussi bête !
Aussi banal que ça !
Un petit moment de rien du tout !
Un interstice de vie dans ma journée de pantin !
Où tout devient possible, nette, claire comme un tournesol !
« J’ai l’habitude d’aller le long des routes
Tout en regardant à droite et à gauche,
Et de temps en temps derrière moi…
Or ce que je vois à chaque instant
Est cela même qu’auparavant jamais je n’avais vu,
Et je sais fort bien m’en rendre compte…
Je sais maintenir en moi l’étonnement
Que connaîtrait un nourrisson si, à sa naissance,
Il remarquait qu’il est bel et bien né…
Je me sens nouveau-né à chaque instant
Dans la sereine nouveauté du monde…
(« Le Gardeur de Troupeaux » Fernando Pessoa) »
Et dans cette possibilité de tous les possibles... nait la possibilité de tous les lendemains !
Des lendemains avec des oreilles pour entendre.
Des yeux pour voir.
Des pieds pour marcher sur la terre et ressentir le poids de nos corps, notre gravité et son contraire ; notre désir de verticalité.
Mon bouquet de vœux pour 201 NEUF est :
Je nous souhaite à tous de trouver la force et le courage pour nous mettre debout !
Dans la joie et sans peur
Avec des yeux pour nous voir
Des oreilles pour nous entendre
Des mains pour nous toucher
Et des lendemains fleuris des possibles…
SOYONS HEUREUX LE MONDE RESTE À FAIRE !
Leonor Canales Garcia
P.S : Les photos qui accompagnent cette lettre sont de François Berlivet (au sein de Latroupéphèmere).
Petit rappel, Marilyn vous attend vendredi 25 à 19h30 à Ploufragan (22)