Quelques notes de piano …

mardi 28 janvier 2014

Quelques notes de piano …

Des enfants jouent, crient autour d’un baby-foot. Les deux sons vont de pairs, se côtoient, comme se côtoient le bruit de fond des voix des hommes qui, accoudés au comptoir boivent une bière ou autre boisson alcoolisée. Je suis au CapLan, un bar librairie improbable, dans un lieu improbable. Un ancien bar, à côte d’une plage dans le Finistère nord, plus concrètement, à Locquirec. Un ancien bar qui était avant un bar de pécheurs. Aujourd’hui il y a toujours les pécheurs qui viennent, mais pas que… les autres, les nouveaux gens, les bobos, les jeunes alternatifs, les touristes de passage, ceux qui ont regardé : « un lieu sympa » sur internet et les gens du coin.

Moi, j’essaie d’écrire au rythme des notes du piano. J’aime cela, courir sur ma machine ordinatrice, avec pleins des mots soulignés en rouge parce que les fautes sont toujours là quand j’écris, même quand j’écris en espagnol. Puisque j’ai perdu, en quelque sorte, la maîtrise de ma langue… ma langue maintenant est le français. C’est avec elle que j’écris mes sentiments mais surtout le cours de ma pensée. L’espagnol est la langue pour mes filles, pour la nourriture, pour la colère, la langue que je partage avec mes amis immigrés qui parlent comme moi, un espagnol usé par le temps et la distance.

Pour quoi je suis là ? Je me suis perdue puis j’ai atterri par hasard dans ce lieu…

Ça serait le début d’une jolie histoire :

Se perdre et atterrir dans un lieu inconnu… chaud, avec vue sur mer, entourée de livres, de gens aux visages doux, ou bien avec des gueules qui portent toute une histoire. Comme toutes les gueules, oui, bien sûr, sauf qu’il y a des êtres qui portent sur eux la cartographie de toute leur vie. Avec le rond-point à questions, le stop à fractures, la bande d’arrêt d’urgence, le Vallée de la « discordia »… etc, etc.

Tout un pays dessiné sur leur peau…

Non, je ne suis pas arrivée par hasard. Je connais le lieu. Je savais qu’aujourd’hui il y aurait un concert. Et puisque rien ne me poussait à rentrer à la maison, au contraire, j’aurai bien voulu disparaître. Pas pour ou à cause d’un désespoir quelconque.
Tout simplement pour le plaisir de se perdre, de sortir de l’axe, de la route !

Et oui, on n ‘a pas besoin d’être au fin fond de soi pour vouloir se trouver ailleurs, ça ne dépend pas que de son état d’âme. Par fois, les lieux connus sont rassurants et par fois, au contraire, ils te serrent à la gorge, ils t’empêchent de te surprendre parce que tout est fait pour continuer un train-train. Tout est fait pour rester dans les rails. Dans un scénario bien connu, bien rassurant, mais pourtant cauchemardesque si on s’arrête un instant pour le regarder avec d’autres yeux.

A ma gauche tout le monde s’agite, ils préparent le lieu, les musiciens sortent leurs instruments. Je ne sais pas ce que je vais écouter, ça me plaît de ne pas savoir.
Au début ça fait peur de sortir du chemin. Même le fait d’aller pas très loin peut faire peur, pourtant maintenant que je suis ici. Seule à ma table, avec mon mac, mon saucisson, et ma bière vide je suis contente d’être là. Les gens sont tous avec d’autres gens, moi je suis seule pourtant…

Le concert va commencer !

Quelques notes de musique :

Deux semaines plus tard, lundi 27 à la Paillette à Rennes !

Je suis sortie de mon axe, de ma route, et c’était bon ! Comme un jour de vacances, une virgule, un « point d’orgue »…

Courir, courir… derrière quoi ? Courir, courir… ne pas s’arrêter !

Depuis ce temps où je me suis arrêtée autrement, où je suis allée vers un imprévu, même si cet imprévu restait maîtrisable, je ne fais que courir.
C’est paradoxal, parce que je dis qu’il faut savoir s’arrêter pour voir et pourtant, aujourd’hui je ne peux pas m’arrêter. Parce que si je m’arrête j’ai l’impression de tomber. Courir ou marcher ça revient au même : dynamique d’un mouvement qui va vers l’avant. Dynamique d’un mouvement qui avance…

Je pense à Barbara : « J’ai peur mais j’avance, j’ai peur mais j’avance » 

J’ai écouté ses mots dans une émission radio sur ses mémoires inachevées.

http://www.franceculture.fr/oeuvre-il-etait-un-piano-noir-de-barbara

J’ai peur mais j’avance, j’ai peur mais j’avance…

Je n’ai pas le choix, je marche, j’avance, je cours. Là, je ne peux pas m’arrêter !


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